L’Etat condamné à payer 10 millions d’euros pour l’abandon de l’Ecotaxe
Le 3 Sep 2018
C’est une décision du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sans doute provisoire compte tenu des sommes en jeu, qui marque une étape dans le contentieux ouvert par l’abandon du projet Ecotaxe par le Gouvernement, suite notamment à la révolte des bonnets rouges bretons, qui démontrèrent plusieurs portiques destinés à la collecte de cette taxe.
Pour l’instant l’Etat ne s’en tire pas trop mal: il est en effet condamné à payer à la société Ecomouv’ (seulement ) la somme de 10 141 931 euros
assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2015, à supporter les frais et honoraires de l’expertise, taxés et liquidés à la somme de
176 400 euros et une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative (TA Cergy-Pontoise, 18 juillet 2018, req. n° N°1507487)
Or, la société demandait au Tribunal de condamner l’Etat à lui verser la somme de 129 753 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2015, outre une somme de 30 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Le Tribunal estime que « la société A est fondée à soutenir que la décision par laquelle les ministres ont, quelques semaines après la confirmation du principe de l’écotaxe par le législateur, résilié le contrat de partenariat liant l’Etat à la société Ecomouv’ n’était justifiée par aucun motif d’intérêt général et que l’Etat a ainsi commis une faute en procédant irrégulièrement à la résiliation de cette convention. Toutefois, cette faute n’est de
nature à ouvrir un droit à réparation au bénéfice de la société requérante que dans la mesure où elle lui a causé un préjudice direct et certain. »
Par suite, pour le Tribunal, il résulte des conclusions de l’expertise, qu’en se fondant sur le plan d’affaires de la société établi en 2010, en tenant compte d’une durée contractuelle d’exploitation du dispositif de cinq ans et en retenant un nombre d’équipements embarqués de 128 957, le manque à gagner subi par la société A du fait de la résiliation anticipée de son contrat doit être évalué à 10 141 931 euros, somme au versement de laquelle l’Etat doit être
condamné ».
En revanche, les demandes relatives aux investissements et charges d’exploitation et financières, les dépenses supplémentaires en raison de la résiliation de son contrat pour récupérer les matériels installés chez ses clients ou démanteler le dispositif de collecte de l’écotaxe, (49 496 000 euros, 14 501 000 euros et de 13 889 000 euros et 7 775 000 euros) sont rejetées .
On notera que le Tribunal alloue une somme de 1.500 € au titre de frais de procédure, ce qui est totalement ridicule et procède d’un dévoiement total des dispositions de l’article L. 761-1 du Code, lequel est en principe destiné à rembourser les frais de procédure de la partie qui gagne le procès. Or, on imagine aisément la complexité de la demande préalable et de l’expertise qui s’en est suivie.
Reste que pour l’heure la quasi totalité des immondes portiques installés un peu partout subsistent, défigurant le paysage, ce qui est tout de même un comble pour une mesure qui se voulait paraît-il écologique…