Pas d’obligation pour une commune de réaliser des réseaux d’évacuation de l’ensemble des eaux pluviales

Le 9 Mar 2022

Par Patrick Gaulmin

Les disposition des articles L. 2212-2 et L . 2212-6 du Code Général des Collectivités territoriales n’ont ni pour objet ni pour effet d’imposer aux communes et aux communautés de communes compétentes la réalisation de réseaux d’évacuation pour absorber l’ensemble des eaux pluviales ruisselant sur leur territoire.

Telle est l’importante précision apportée par un arrêt du Conseil d’Etat du 11 février 2022 (pourvoi 449831).

En premier lieu, si le maître de l’ouvrage est responsable, même en l’absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement, ce régime de responsabilité ne s’applique pas aux préjudices subis du fait de l’absence d’ouvrage public.

Selon le Conseil d’Etat, en jugeant, pour rejeter les conclusions des requérants tendant, sur le fondement de la responsabilité sans faute des personnes publiques en raison des dommages subis par les tiers du fait des ouvrages publics, à la condamnation de la commune à réparer les préjudices qu’ils subissent du fait de l’augmentation du volume des eaux de ruissellement sur leur propriété qu’ils attribuent à l’imperméabilisation du sol résultant de la réalisation, en amont de leur propriété, d’un lotissement d’initiative privée, d’une part, que ce phénomène ne constituait pas en lui-même une opération de travaux publics dont la commune de Pont-Salomon devrait supporter les conséquences dommageables pour les tiers, d’autre part, qu’aucun ouvrage public appartenant à la commune de Pont-Salomon n’était incriminé par M. et Mme G…, la cour administrative d’appel (CAA Lyon, 17 décembre 2020, n° 19LY0178) n’a ni commis d’erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits de l’espèce.

En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (…) / 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que (…), les inondations (…) et, s’il y a lieu, de provoquer l’intervention de l’administration supérieure (…) « . L’article L. 2226-1 du même code dispose que  » la gestion des eaux pluviales urbaines correspondant à la collecte, au transport, au stockage et au traitement des eaux pluviales des aires urbaines constitue un service public administratif relevant des communes, dénommé service public de gestion des eaux pluviales urbaines.  » Aux termes de l’article R. 2226-1 de ce code, la commune ou l’établissement public compétent chargé du service public de gestion des eaux pluviales  » assure la création, l’exploitation, l’entretien, le renouvellement et l’extension de ces installations et ouvrages ainsi que le contrôle des dispositifs évitant ou limitant le déversement des eaux pluviales dans ces ouvrages publics (…) « .

D’une part, si les dispositions précitées confient au maire le soin d’assurer la sécurité et la salubrité publiques en prévenant notamment les inondations par des mesures appropriées et instituent un service public administratif de gestion des eaux pluviales urbaines dans les zones identifiées par les documents d’urbanisme comme  » urbanisées et à urbaniser « , elles n’ont ni pour objet ni ne sauraient avoir pour effet d’imposer aux communes et aux communautés de communes compétentes la réalisation de réseaux d’évacuation pour absorber l’ensemble des eaux pluviales ruisselant sur leur territoire. Par suite, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose aux communes de recueillir l’ensemble des eaux de pluie transitant sur leur territoire. D’autre part, en déduisant également de ces dispositions que la commune de Pont-Salomon n’avait commis aucune faute dès lors qu’il résultait des certificats délivrés par le préfet de la Haute-Loire les 24 janvier 1981 et 9 juin 1982 que la prescription tenant à la mise en place d’un réseau d’évacuation des eaux pluie par des canalisations d’un diamètre de 400 mm à laquelle étaient subordonnées les autorisations de lotir en amont de la propriété de M. et Mme G…, avait été exécutée, et alors qu’il n’était pas allégué que la mise en place d’autres équipements était nécessaire pour assurer la sécurité des personnes et des biens, la cour n’a pas plus commis d’erreur de droit.

En troisième lieu, la cour n’a ni commis d’erreur de droit en n’indemnisant pas les requérants des préjudices subis du fait de dommages dont elle a jugé que ni la commune, ni la communauté de communes ne pouvaient être tenues pour responsables, ni dénaturé les faits de l’espèce en évaluant à 3 000 euros la réparation de leur préjudice moral et les troubles subis dans leurs conditions d’existence du fait de l’ensablement fréquent de leur terrain au niveau du portail nord-ouest, résultant de l’insuffisance et de l’inadaptation du réseau public d’assainissement.

En quatrième lieu, la cour a relevé, pour rejeter les conclusions de M. et Mme G… tendant au prononcé d’une injonction à réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres qu’ils subissent du fait de l’insuffisance et de la mauvaise conception du réseau public d’assainissement, qu’il ne résultait pas de l’instruction, compte-tenu des travaux réalisés durant l’été 2020 par la communauté de communes Loire Semène sur cet ouvrage en exécution du jugement attaqué, que les dommages allégués par les requérants perduraient à la date de l’arrêt attaqué. En statuant de la sorte, la cour n’a pas dénaturé les pièces du dossier.

 

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